Orfèvre du textile, Cécile Bertrand séduit par ses bijoux décalés et chaleureux. Un travail que l’on estime tant pour le savoir-faire que pour l’engagement écologique qu’il reflète. « Marre des diktats des saisons, de cette mode “kleenex” où l’on gaspille sans arrêt », nous revendique-t-elle à travers ses bijoux, véritables contre-pieds de la joaillerie classique qu’elle détourne avec maîtrise et finesse. Constituées de rebuts de cravates, de soies et de matières chinées dans les brocantes et autres endroits gardés secrets, les parures de Cécile imposent leurs couleurs franches ou délicates au travers de volumes généreux et arrondis. En redonnant de la valeur à ce qui n’en a plus, elle révolutionne le beau et soulève, par le charme et la légèreté, les questionnements actuels de la société. Sous ses créations sensibles et poétiques, Cécile mène un combat où géométries et petites figurations forment un paysage de témoins silencieux de notre temps. Un combat qu’elle a mené pour la vie aussi, défendu à coups d’aiguilles à coudre, à coups de cravates, à coups d’ardeur et de douceur mêlées. Comme une échappatoire sinon, un moyen de se libérer de ses maux, l’Œuvre de Cécile Bertrand nous a tous touché par sa subtilité. C’est aujourd’hui avec recul que ses dernières créations se révèlent à nous comme des évidences. Et mon amie la rose me l’a dit ce matin, c’est en ces termes — sans même le savoir, peut-être — que Cécile nous a dit au revoir, trahissant la mélancolie et l’acceptation d’un destin si fragile. Exposé récemment au sein de notre galerie, ce collier éponyme, serti d’épines de rose, fait figure d’emblème pour notre association. Ce bijou et ses charmantes Grenades pour le Prix européen des Arts appliqués 2018 matérialisent sa présence au sein d’un groupement de créateurs et nous rappellent, grâce à la force de l’art, la fragilité de l'existence. Comme le combat qu’elle a mené, un dernier cri lancé au monde, une dernière explosion de vie, une dernière rose à partager.